Ce vendredi, 21 octobre 2022, le jeune de 36 ans a accordé une interview à la rédaction d’avenirguinee.org à Kaloum, centre des affaires du pays.
D’un père commerçant, notre interlocuteur dit se sentir mieux dans la mode. Il décide donc de rentrer au pays et s’aventurer dans la culture afin de servir de sa manière la Guinée.
« Je réside en France et ça fait un moment que je commence à revenir au pays pour voir un peu ce que je peux entreprendre. Je suis né ici et suis parti en France ça fait plus de de 10 ans (2012-2013).
Je reviens dans ce pays parce qu’on est mieux chez soi. Et, je suis parti là-bas pour me chercher et pour faire mes études. Et, quand j’ai fini, j’ai décidé de revenir au pays pour voir un peu ce que je peux apporter avec le peu d’expérience que j’ai vécue là-bas non seulement au pays, mais aussi en Afrique », dit-il à l’entame de sa prise de parole.
Poursuivant, « en France, j’ai eu mon bac en commerce et j’ai commencé à travailler dans des grandes boîtes. Donc, j’ai été passionné par la mode et tout ce qui est commerce depuis à l’enfance. Puisque mon père a été commerçant, c’était donc une passion pour moi et surtout tout ce qui est textile ».
Comme bon nombre d’entrepreneurs, ce guinéen s’est lancé dans ce monde nouveau pour des raisons qu’il nous a confiées. Ibrahima Diakhaby, après avoir contribué à l’évolution de plusieurs entreprises dans son pays d’accueil, se montre comme un jeune visionnaire, jaloux de sa liberté. Pour cela, il fallait bien qu’il se lance dans l’entreprenariat.
« Mes motivations, c’est en rapport à l’autonomie. Parce que, quand tu es entrepreneur, tu décides des choses pas comme tu veux mais tu les réalise comme tu veux. C’est différent que tu travailles pour quelqu’un et que tu te lèves à 4h du matin et que c’est lui qui a le monopole de tout. Moi, c’est surtout cela que j’ai envie de casser parce que ça fait 10 ans que je fais ça chez les blancs. Donc, non seulement aujourd’hui je suis français, mais je ne me sens pas chez moi. Du coup, je veux revenir chez moi puisque je me sens bien ici qu’ailleurs. Ailleurs, la seule importance, c’est d’apprendre ce qui n’est pas chez moi, prendre cela et revenir l’implanter pour que je sois un peu utile pour mon pays comme Lamine Guirassy et pas mal de personnes qui sont parties chercher quelque chose et revenir chez elles », explique-t-il. Soulignant ainsi les difficultés qu’il rencontre dans ce pays qu’il a quitté il y a plus de 10 ans.
« Même là, je rencontre les difficultés mais il faut les surmonter. De toute façon, quand tu n’es pas prêt mentalement, tu ne peux pas t’aventurer dans l’entrepreneuriat parce que forcément ce n’est pas tout le monde qui peut le faire. Il faut non seulement avoir des moyens, mais il faut aussi être dur mentalement parce que tu auras des gens qui vont te casser les pieds, qui vont te balayer. Mes difficultés, c’est parce que je suis parti il y a longtemps, pour revenir et comprendre le pays, connaître les bonnes personnes pour te montrer le chemin, c’est ce qui est difficile surtout ici en Guinée. Parce que tout le monde ferme la porte. Mais après, quand tu es quelqu’un qui sait ce que tu veux, tu es quelqu’un de visionnaire, tu te mets par terre, tu fais comme tout le monde. Je préfère marcher ici que la pluie ou le soleil me tape, que d’aller chez les blancs et rester comme une personne perdue », lâche le jeune entrepreneur.
Malgré ces obstacles interminables qui se présentent sur son chemin, il n’a pas abandonné. Aujourd’hui, son premier objectif, celui de lancer son entreprise est atteint.
« J’ai créé cette entreprise dénommée » IDIACKS COLLECTOR » pour un objectif bien déterminé. J’ai fait des études de commerce quand je suis parti à l’aventure et faire les études de commerce, ce domaine-là m’a déjà marqué depuis quand j’étais ici. J’aimais beaucoup les vêtements, je m’habillais bien avec le peu de moyens que j’avais. Donc, quand je suis parti à l’étranger, après les études, j’ai regardé autour de moi ce qui m’allait parce qu’il faut faire un travail dans lequel tu te sens mieux. Donc, je me suis lancé dans le domaine du textile et j’ai commencé à travailler. Au fur et à mesure que j’avançais, les portes s’ouvraient pour moi, et je me sentais mieux dedans. Parfois, je faisais certains défilés de mode. Et, depuis l’enfance, j’ai décidé de créer ma propre marque. Là aujourd’hui, je l’ai fait parce que j’ai travaillé pendant ces 10 ans là pour économiser afin de me lancer ».
Or mis cette méconnaissance partielle du pays, il faut tout de même noter que Ibrahima n’est pas tout nouveau dans l’entreprenariat. Il souhaite économiser les expériences acquises pour les mettre au service du textile et de la mode.
« Avant, j’avais déjà mis en place une entreprise de transport. Je prends les colis ici pour les envoyer à l’extérieur, et je prends en France pour amener ici pour aider en ma manière la communauté guinéenne autour de moi. Donc, je venais, je regardais un peu le pays. Maintenant, je me suis dit qu’il faut que je lance ma marque, je vais à Boké pour ouvrir la boutique dans ma ville natale », martèle-t-il.
Par contre, le diplômé de l’école de commerce de Marseille est bien conscient de la concurrence sur le marché. A l’en croire, la décision de choisir ce domaine est bien mûrie. Elle est prise après l’étude du terrain et la connaissance parfaite du manque à gagner dans le secteur du textile en Guinée. Ainsi, son entreprise à une particularité essentiellement liée à la qualité de ses produits.
« La particularité chez moi, c’est parce que j’ai eu la chance de bouger. J’ai un passeport qui me permet de bouger partout dans le monde et je vise la qualité. Je prends les produits en France, c’est cher oui, mais je préfère prendre la qualité pour le peu de clients que je vais voir. Aujourd’hui, c’est vrai que tout le monde se lance dans le textile, mais après il faut connaître et aimer le secteur. Il n’y a pas mal de personnes qui le font juste pour l’argent, pour l’instant je ne gagne rien, je sors l’argent parce que c’est ma passion. Du coup, je vise la qualité qui va faire la différence entre moi et les autres. Tous mes produits viennent de l’Europe (France, Turquie…) et je mélange un peu les textiles africains. Et même ça, je prends les tissus en Europe pour les ramener ici ».
Après le lancement de sa première boutique à Boké, qui est, il faut le rappeler, un moteur d’emploi de jeunes locaux, Ibrahima Diakhaby a des ambitions : couvrir toute la Guinée à travers sa marque.
Mohamed Cissé pour avenirguinee.org